Alpina 1/2003
La pierre, objet de culte? Elle l'a été assurément depuis la nuit des
temps aux quatre coins du monde. Pierres de toutes les provenances,
compositions, formes et couleurs, elles ont en commun la particularité de
détenir un pouvoir, elles sont détentrices de propriétés surnaturelles liées
à des forces invisibles, en cela elles font partie ou sont à l'origine d'une
cosmogonie particulière. On leur prête des vertus magiques en vue d'un
résultat précis. Pierre parmi les plus célèbres de notre culture
occidentale, la blanche omphalos de Delphes était censée désigner le centre
de la terre, véritable nombril qui évoquait une nouvelle naissance. Les
Grecs de l'Antiquité ont adopté cette définition que l'on retrouve dans des
sociétés antérieures.
Nous sommes dans l'univers de mythes et de symboles pour la
plupart immémoriaux. Souvent les archéologues ne parviennent pas à dater une
pierre cultuelle avec un tant soit peu de précision, ni à se prononcer si
elle est le produit de l'érosion ou de facture humaine, et bien des
questions restent posées sur son rôle de condensateur d'énergie au sein
d'une communauté. Si l'on a du temps devant soi il est intéressant de
comparer les significations attribuées aux pierres désignées comme sacrées
dans les civilisations, par exemple, chinoise, arabe, celte, africaine,
égyptienne, altaïque. De chercher les nombreuses références contenues à cet
égard dans les écrits vétéro et néotestamentaires. Pour Maître Eckhart la
pierre était synonyme de connaissance. Sur un tout autre plan, lequel
d'entre nous n'a jamais ramassé au bord de la mer ou d'un cours d'eau un
galet en raison de son esthétique et simultanément du souvenir qu'il
évoquera plus tard?
En franc-maçonnerie la pierre est considérée prioritairement
dans la symbolique de la construction, c'est-à-dire du perfectionnement
individuel. Elle n'est plus le lieu d'une adoration, d'une superstition ou
d'une croyance unique mais désigne l'emplacement où le travail se fait, dans
la pleine conscience de soi. Ce symbole ne cesse de nous interroger, il
figure au cœur de notre enseignement. Peut-être est-ce parce que la pierre
livrée à nos soins est une image trop évidente que les contributions sur ce
thème n'emplissent pas notre édition de janvier? Cependant, les autres
articles ne sont pas sans rapport avec le sujet désigné. La sagacité de
chacun saura établir des liens entre eux.
Last but not least, nous souhaitons à tous nos lecteurs une
excellente année 2003.
Jacques Tornay
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