La Voûte céleste offerte à notre comtemplation
Une mise en oeuvre d’énergies
Il nous apparaît d’abord que «voûte céleste» et «voûte étoilée» ne
signifient pas exactement la même chose. Nous nous attachons à méditer ici
sur les cieux entourant notre planète, sans oublier le plafond étoilée du
temple maçonnique.
FRANÇOIS PERRET-GIOVANNA (Revue maçonnique suisse: décembre 2003)
On perçoit en général le ciel comme une couverture de la terre, le tout
formant une espèce de grotte. Ainsi peut-on rapprocher la voûte céleste de
la voûte du palais dans la bouche, organe par lequel s’émettent pensées,
sentiments et opinions. S’y associe la voûte crânienne où s’élabore tout ce
que nous exprimons. Mais elles sont rigides et fermées, à l’image exemplaire
de la grotte de Lascaux. Or, la voûte céleste s’ouvre au contraire sur
l’infini.
On peut relever à cet égard le caractère trompeur de notre vision du ciel
étoilé. Nous n’y percevons pas les distances réciproques entre les astres
eux-mêmes et notre globe. Nous voyons aussi luire des étoiles d’une clarté
posthume car, en fait, elles sont déjà éteintes.
Il n’empêche que l’être humain a pu découvrir que l’Étoile polaire offre
un repère au voyageur pour le guider dans sa marche nocturne. Nous noterons
également que les phases de la lune ont une incidence sur nos comportements
collectifs. Donc, sur un plan strictement sensoriel, selon l’observation à
l’oeil nu, la voûte céleste, de nuit en particulier, se cache et se découvre
un peu comme cette «lumière douteuse» montrée au néophyte par le rituel
d’initiation de «La Vraie Union».
Les ambiguïtés ci-dessus s’effacent lorsque notre contemplation de la
voûte céleste nous amène à méditer sur le plan symbolique. Nous constatons
alors l’émergence de forces positives venant à nous de la voûte céleste
nocturne.
Elle favorise la réflexion; souvent l’insomnie ou un réveil très matinal
engendrent de bonnes décisions. La nuit permet aussi de percevoir certaines
choses que cachait l’éclat du jour. Et l’apparente immutabilité des astres
les uns par rapport aux autres en une lente rotation où chaque étoile ou
planète garde sa place, nous pénètre d’un sentiment de respect. Il faut pour
cela bien sûr que la voûte céleste nocturne s’offre à notre regard dégagée
de tout voile nuageux.
La lune est naturellement évoquée, douce et redoutable tout à la fois.
Jadis dans nos campagnes on couvrait les fontaines pour éviter que les
animaux boivent le reflet de son image.
La voûte céleste est également inséparable du soleil, mais quand il se
lève nos yeux ne distinguent plus les étoiles. À l’inverse, nos temples,
eux, nous montrent en simultanéité le soleil, la lune et la voûte céleste
étoilée. Cela met en évidence une figuration de type cosmique, à savoir
globalisante et nous nous retrouvons ainsi sous un ciel d’architecture,
immobile, rassurant, d’où ne tombera aucun aérolithe susceptible de venir
ravager, voire anéantir notre globe terrestre. Pur et sans tache, tout en
symbole, s’y déroule le cycle des saisons avec ses deux pointes
solsticiales.
Il nous a encore semblé que le Ciel serait comme une porte, celle de nos
origines et celle de notre au-delà. Ne dit-on pas aux petits enfants qu’une
personne décédée est allée au ciel et nous autres francs-maçons n’avons-nous
pas adopté l’expression «Orient céleste»?
Selon une très antique intuition, les hommes tendent à croire que l’on
peut agir sur un être ou un aspect de la nature (arbre, rocher, etc.) en
refabriquant son image. A Lascaux, les taureaux peints visaient très
probablement à enclencher une captation magique.
Il en va de même dans un bâtiment aussi significatif que le Panthéon de
Rome. La cime de sa voûte solaire, ouverte sur un monumental axe du monde,
relie magiquement le ciel à la terre. Là nous pouvons entrer dans cet axe,
le capter, du zénith au nadir. Et, de là aussi, l’axe panthéonique peut nous
devenir refuge secourable, quel que soit le lieu où nous aurons porté nos
pas, à la ressemblance de ce long fil à plomb que l’on voit accroché à la
voûte étoilée de certaines loges.
En son premier Livre d’Architecture Vitruve mentionne la bienséance comme
l’une des cinq caractéristiques de l’art de construire. Par bienséance
l’illustre Romain entend que tout bâtiment (et le temple en particulier)
sera conçu et réalisé de façon que ses utilisateurs puissent y mettre en
oeuvre les énergies spirituelles nécessaires (le divin, pour ceux à qui ce
mot convient). Ainsi, déclare Vitruve: «on ne fera pas de toit au Temple de
Jupiter tonnant, ni à celui du Ciel, non plus qu’à celui du Soleil et de la
Lune : ils seront découverts, parce que ces divinités se font connaître en
plein jour et par toute l’étendue de l’univers». La lune en plein jour, en
même temps que le soleil? Oui, en un ciel dégagé, à l’aube et au crépuscule,
comme chacun peut l’observer ! Alors seulement la vision de la voûte céleste
s’accorde à celle de nos voûtes étoilées où ces deux «divinités », selon
Vitruve toujours, s’offrent à notre contemplation, non de manière fugitive,
mais en permanence. Elles nous proposent cette conclusion morale: si nous
sommes chacun, intimement, une voûte étoilée sachons sortir de nos temples
avec un ciel intérieur «bienséant», soit libre de toute nuée porteuse
d’orage!
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