Dès notre entrée dans le temple la musique interpelle nos sens

Etre pleinement présent

Elle nous aide à nous mettre en condition pour travailler sur nous-mêmes. Comment être et devenir un homme dans sa plénitude, un être épanoui qui, s’élevant, contribue à élever l’humanité toute entière?

 Loge Pythagore, Aubonne (Revue maçonnique suisse: juin/juillet 2005)

Cet être dans sa plénitude a une dimension d’émotion, de capacité cognitive essentielle qui fait partie de lui et qu’il doit cultiver, voire harmoniser. L’art, et particulièrement la musique, est un travail au sens que nous connaissons et glorifions. Il nécessite l’intelligence, l’émotion créatrice de l’auteur, du compositeur, des concepteurs et réalisateurs d’instruments, des interprètes, des créateurs et responsables des moyens de reproduction et de diffusion, des marketeurs et des distributeurs qui en facilitent l’accès, etc. Mais cet art nécessite de notre part un travail sur nous-mêmes, pour comprendre, nous éduquer, nous entraîner à mieux nous émouvoir, pour ouvrir nos sens à davantage de découvertes et à d’autres émotions. Le franc-maçon sait qu’il doit travailler et apprendre, apprendre aussi à pleurer, trembler, aimer, imaginer, pressentir, rire et rêver. La musique l’aide en tout cela. L’être humain n’étant pas unidimensionnel il cherche sans cesse à se réunifier, il s’agit comme dans la musique d’une question d’harmonie.

Dans la mythologie antique les muses présidaient aux arts libéraux. Euterpe présidait à la musique, point essentiel d’une chose, autrement dit: intervalle, dont le rythme fait l’harmonie évoquée ci-dessus. Si le franc maçon doit apprendre à rire et s’amuser, les Chinois l’ont fait dès 2700 av. J.C. environ, en fondant leur technique musicale sur un principe arithmétique, par jeu. Cette rigueur scientifique fut redécouverte par les pythagoriciens. À leur école se rattache une musique des sphères qui leur est un moyen de s’associer à la plénitude du cosmos. Dans toutes les civilisations les actes les plus intenses de la vie sociale sont scandés de manifestations où la musique joue un rôle médiateur pour élargir les communications jusqu’aux limites du divin, comme elle aide le maçon dans sa quête de la plénitude. Au début était le verbe, et il était avec Dieu, le verbe était Dieu. Tout ce qui est perçu comme son, disent les anciens textes sacrés, est puissance divine.

La connaissance n’est donc pas seulement une vision, mais aussi une perception auditive. L’ouïe étant antérieure à la vue, ce n’est pas par hasard que le néophyte entre au temple un bandeau sur les yeux. Cela montre l’importance du son et de la musique dans notre cérémonial.

Choisie en fonction des rituels, la musique doit d’être de circonstance. C’est le rôle de la colonne d’harmonie, et le nôtre consiste à saisir la substance de cette musique, à être conscient de son impact sur le physique et l’être intérieur. Nul n’est indifférent à la musique, elle nous transporte, nous agace, mais ne nous laisse jamais insensible. La musique est par ailleurs une source d’énergie, et un moyen de rééquilibrer le flux énergétique du corps et de l’esprit. Celle qui orne nos travaux procure donc à qui sait l’écouter une élévation de sa conscience vers le mystique, plus près du Grand Architecte.

Art magique par excellence, la musique est envoûtante. Le symbolisme de ses notes nous rappelle le chiffre sept. La conjonction des sept couleurs produit la lumière blanche, l’unisson, qui représente la vertu et les trésors de la divinité. De même, les sept consonances sont en correspondance avec les sept astres. La colonne d’harmonie contribue ainsi à créer l’unité dans le temple. La musique est présente dans tous les moments importants de la vie. Dans le cadre maçonnique elle nous enveloppe de façon à ouvrir notre perception et nous libère l’esprit afin d’être pleinement présent.