Alpina 2/2003
La liberté est l'une de ces grandes idées dont on a fourni énormément de
définitions. On essaie aujourd'hui encore de trouver les formules les mieux
à même de traduire une notion fluide, sujette à interprétations, parfois
contradictoires. On ne saurait pourtant se passer de cette grande
aspiration, jamais totalement aboutie, toujours à remettre sur le métier,
l'une des plus belles conquêtes de l'humanité à condition qu'elle s'adresse
à l'ensemble des peuples et des individus de la planète terre et que chacun
puisse en bénéficier dans les meilleures conditions possibles. Vouloir la
liberté ou, plus concrètement, les libertés pour soi-même revient à les
désirer pour les autres. Nul n'est libre tout seul. Aller dans ce sens
signifierait d'abord reconnaître en soi des droits et devoirs inaliénables
dans l'exercice de sa pensée, de ses activités. Ce serait aussi faire
confiance à l'homme, à la femme, au même titre que l'on croit en sa valeur
personnelle, donc parier sur l'avenir. L'oppresseur, lui, n'accorde sa
confiance à personne. La plupart des maximes, adages et aphorismes sur la liberté
nous séduisent. Nous y voyons souvent le reflet de nos propres expériences.
Il est rare, cependant, qu'aucune d'entre elles nous satisfasse entièrement
car toutes sont trop liminaires, demandent un complément, une précision
nécessaire pour être adoptées sans réserve. Chaque point de vue ne tient
compte en général que d'une partie de la réalité, la sienne… On pressent
alors de manière plus ou moins claire que la première des libertés reste à
réaliser en son for intérieur. Mais quelle est-elle dans un monde où notre
destinée ne nous appartient pas pleinement, où l'on maîtrise peu et mal les
événements extérieurs ? Nous pourrions évoquer ici le besoin d'avoir et de
renforcer une conviction qui ne devrait rien à la sphère civique, une
conviction des tâches qu'il s'agit d'accomplir en accord avec les impératifs
les plus élevés de sa conscience. Le collectif et l’individuel vont ainsi de
pair lorsqu’il s’agit de liberté. Un bon système permet l’expression de
l’individu, cette dernière permet en revanche d’améliorer le système, voire
de le renverser s’il est liberticide selon les normes que nous connaissons.
L’idée de liberté est incluse dans les termes de la
franc-maçonnerie. Nous devons, tous, lui conférer réalité dans notre
existence de chaque jour.
Jacques Tornay
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