Equilibre et harmonie en francmaçonnerie
(Alpina 10/2012)

«Equilibre-Equité-Bienveillance-Harmonie », ces règles de Confucius figuraient au-dessus du bureau de l'empereur Tchang. Les quatre termes entretiennent entre eux des proximités évidentes, chacun a pourtant son autonomie, même si l'on sent bien que cultiver une seule de ces qualités signifie entraîner les trois restantes à sa suite. Un autre sage affirme : «La vie est le maintien d'un équilibre sans cesse menacé». D'où l'importance de travailler sur soi-même avec constance afin de préserver la stabilité, d'abord dans sa tête, puis sur le plan familial, en société, entre les nations, etc. Les guerres résultent forcément d'une tragique rupture d'équilibre causée par la haine et le pouvoir. Tout ce qui vit à la surface de la terre a besoin d'un certain agencement avisé des forces en présence pour perdurer et prospérer. Il n'en va pas différemment au sein d'une loge maçonnique. Celle-ci ne peut fonctionner dans les meilleures conditions que si chacun y met du sien, respecte les usages, se montre soucieux de l'intérêt général et contribue à la bonne marche de l'ensemble en laissant de côté, en plus des métaux, ses éventuelles petites excroissances d'orgueil personnel susceptibles de perturber les travaux. Puisqu'il est aussi question, ici, d'harmonie, une loge est un peu comme un orchestre, en somme.

Dans la sphère individuelle, atteindre à l'équilibre et à la consonance intérieurs est chose ardue - sauf pour les personnes chanceuses dotées d'un sens inné de la mesure. La plupart d'entre nous devons combattre de pernicieux penchants. Cependant, la francmaçonnerie offre d'inépuisables moyens de parvenir à la sérénité. En premier lieu dans son enseignement du symbolisme, ensuite par son encouragement à l'étude et à la méditation. Inutile d'aller s'allonger sur le divan d'un psy. L'adepte dispose en lui des outils nécessaires à la paix de son esprit. Veillons toutefois à ce que cette sagesse que nous sommes censés acquérir ne se fige pas dans un état de satisfaction béate et complaisante. Elle doit au contraire nous conduire à une forme d'audace éclairée, à concevoir et à réaliser toujours davantage. Seules les vertus constamment mises à l'épreuve de la réalité demeurent vivantes. Donc, attention à ne pas se bercer de tranquilles certitudes.

Jacques Tornay

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