Alpina 12/2002
L'essentiel est dit sur le temple dans les articles de ce numéro. Temple,
lieu où l'être se recueille dans la perspective d'une dimension plus vaste
que celle qui lui est assignée sur la terre, lieu séparé du monde profane et
en même temps indissociable de lui puisque né du travail des hommes tout
comme les dieux sont nés de leur imagination (à moins qu'il ne s'agisse de
l'inverse…), ou de leur force à concevoir un univers hors de leur portée et
que l'on nomme sacré faute de pouvoir l'expliquer. Du reste, nos auteurs
achoppent sur la définition de ce terme, comme les cohortes de penseurs, de
théologiens et de savants de tout poil qui nous ont précédé et nous
suivront. On ne cerne pas l'invisible. Pascal devait admettre l'échec
de sa folle entreprise visant à prouver l'existence de Dieu. Et ceux qui,
hier comme aujourd'hui, se posent en maîtres dans ce domaine ne peuvent nous
offrir que des interprétations. Devant tant d'efforts inaboutis pour
démontrer l'indémontrable on serait tenté de voir une chimère en toute forme
de spiritualité. Pourtant, la personne humaine a besoin d'une vision qui la
dépasse, et vouloir extirper la notion de sacré revient à extirper également
la source de la musique, de la poésie, de l'art authentique en général, de
nos émotions les plus vraies et de nos sentiments les plus généreux.
Intervient ici l'idée du temple avec ce qu'il implique de gestes et de
paroles pour nous aider à trouver du sens à la vie, et par conséquent à ces
deux grands mystères que sont la naissance et la mort.
Certains de nos collaborateurs de cet Alpina de fin d'année
relèvent très opportunément que le temple peut et, en fin de compte, doit
être partout. Sans exclusive. En effet, là où bat un cœur bien habité, là où
une conscience interroge, se trouve aussi un temple.
Jacques Tornay
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