Le serment
(Alpina 3/2012)
Comme de juste, nous nous en tiendrons ici au serment que nous connaissons en franc-maçonnerie et qui relie comme un fil bleu les frères d'une loge, d'une obédience, et de par le monde. La prestation de serment du récipiendaire lors de son initiation varie d'un rite à l'autre quant aux gestes pratiqués et aux termes utilisés, quoique dans une assez faible mesure. L'esprit demeure identique partout et en cela respecte la tradition. Il n'empêche qu'au fil du temps des formules du texte ont pu paraître désuètes aux yeux d'un certain nombre de maçons, formules ne correspondant plus guère au Zeitgeist. Des Grandes Loges ont ainsi supprimé ou changé des passages estimés surannés, inutiles, comme ce fut le cas pour la GL d'Angleterre en 1986. Il n'est pas exclu qu'à l'avenir d'autres modifications seront apportées dans le but de s'en tenir à l'essentiel, sans pour autant altérer la signification et le contenu profonds du serment. Ce dernier est souvent suivi de l'adjectif solennel pour souligner son caractère cérémonial et public. Tout dans la manière de procéder indique à l'apprenti que ce moment particulier du rituel revêt l'aspect d'un engagement qui implique son être entier, auquel il souscrit coeur et âme. Son attention est requise au plus haut point. C'est de lui-même qu’il est question en l'instant. Il s'agit d'une forme de contrat non écrit par lequel il promet d'oeuvrer avec sérieux à l'alliance fraternelle qu'il a choisie. On ne saurait par conséquent minimiser la portée d'une telle décision, qui est également une promesse de fidélité. Ceux qui entourent le nouveau maillon s'imprègnent une fois de plus, comme à chaque initiation, des mots prononcés. Un serment n'est fait qu'une seule fois. Sa valeur est inconditionnelle, on n'y revient pas, d'où la nécessité qu'il soit concis, clair, immédiatement saisissable, dépouillé de toute fioriture mais suffisamment explicite tout de même, d'une longueur maîtrisée de sorte qu'il n'égare pas la compréhension. Un serment ne vaut que devant témoins. Ce sont autant de présences bienveillantes qui attestent d'un acte et s'en portent garants. Toutefois, c'est en soimême que l'on est assermenté avec le plus de certitude. Sa propre conscience occupe la première place, elle concerne l'homme dans son intégralité, l'homme unique, indivisible, qui pense et agit parmi ses semblables en humanité.
Jacques Tornay
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