Alpina 11/2001

Une fois n'est pas coutume, la partie "thème" de cette édition de novembre comporte seulement des textes en rapport avec le sujet du mois: l'euthanasie, et nous n'excluons pas de recevoir de nouvelles contributions à court terme. Bien sûr le problème nous concerne tous car on s'interroge sur la façon dont nos proches vont mourir. On imagine aussi des cas de figure pour soi-même et quelle serait notre attitude si nous étions dans une situation désespérée. Personne aime brasser de telles idées, elles n'en font pas moins partie de notre quotidien et obligent l'individu autant que les communautés humaines à un examen de conscience. La vie a un caractère sacré, d'ailleurs la mort aussi, même hors de l'institution religieuse.

Il s'avère dès lors difficile non seulement de débattre d'un sujet aussi délicat, que nul ne saurait maîtriser en son entier, mais encore de prétendre lui apporter une solution satisfaisante pour tous. Rien n'est simple lorsqu'il s'agit de la fin de notre séjour terrestre.

Un cadre juridique pour la pratique de l'euthanasie apportera-t-il le secours que certains espèrent? En tout état de cause c'est à ce propos que depuis quelque temps partisans et adversaires animent le débat dans notre pays en multipliant les prises de position. Deux points de vue parmi d'autres s'affrontent. Les voix favorables à un départ en douceur dans la légalité du praticien affirment qu'il en va du droit de chaque malade incurable à exercer son autonomie, donc de se prononcer de manière responsable en vertu de son libre arbitre. Les opposants, eux, voient dans ce processus une évolution très dangereuse parce qu'elle ouvrirait la porte aux abus de toutes sortes. Ceux-ci devront-ils alors être contenus par une nouvelle loi, au risque de faire de l'euthanasie un imbroglio juridique, occultant la dimension humaine de la question? La personne atteinte irrémédiablement dans sa santé est vulnérable. Souvent aussi elle souffre de solitude, la présence affectueuse et désintéressée de son entourage immédiat joue alors un rôle que l'on n'estimera jamais assez. Un certain nombre de malades sont tout simplement fatigués de vivre parce qu'ils se sentent devenus inutiles. Ces interrogations figurent parmi les nombreuses que soulèvent les ateliers d'Aubonne et de Genève dans le présent numéro. Sans parvenir à des réponses définitives, il faut bien le dire, ce n'était du reste pas notre objectif. Toutefois, au-delà de l'euthanasie nous devrions ouvrir une discussion plus vaste qui porterait sur le sens et la valeur que nous accordons à la vie aujourd'hui dans nos sociétés modernes.

Jacques Tornay

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