Alpina 12/2003

Un temple maçonnique digne de ce nom possède sa voûte céleste, dont le bleu roi est constellé d’étoiles, orné selon les cas de rayons solaires, de halos ou d’autres attributs de la sphère d’en haut. Sa présence est loin d’être décorative uniquement. On lui trouvera d’innombrables significations mais d’abord elle nous rappelle que le ciel et la terre font cause commune. Pour acquérir sa pleine justification le travail que nous effectuons ici-bas doit être en résonance avec un plan supérieur, sinon nous n’accomplirions que des gestes mécaniques, guidés par l’habitude ou l’instinct. La nécessité matérielle du labeur terrestre rejoint ainsi le dessein d’une construction infiniment plus vaste dont il ne nous est pas donné de percevoir la finalité. Dès qu’il y a cérémonie à caractère sacré l’humanité n’est plus la seule concernée; et s’interrogeant sur ce qui la dépasse elle s’interroge en même temps sur elle-même.

La voûte céleste signifie aussi que travaillant dans un lieu fermé le francmaçon n’en est pas moins relié au monde et à l’univers. Pour les mêmes raisons de base, supposons-nous, elle est présente dans les églises, mausolées, baptistères, dans presque tout édifice à vocation religieuse où l’être humain est censé se recueillir. D’autres éléments viennent alors souvent s’ajouter au simple décor céleste. Sa représentation est figurée depuis les époques les plus anciennes comme si, de toujours, l’homme attendait qu’en surgisse les réponses à ses questions. La voûte céleste devrait également nous remettre en mémoire que les maçons opératifs oeuvraient à ciel ouvert.

Malgré l’exploration de l’espace de ces dernières décennies et les avancées techniques dans ce domaine, l’illimité au-dessus de nos têtes gardera son mystère. Contempler le firmament dans son incessante activité, admirer sa composition en s’émerveillant de son infinitude, restera une affaire de poètes plus que de savants, et de tous ceux qui osent encore rêver. Peut-être la voûte céleste lèvera-t-elle un coin de son voile à qui ne lui demandera rien…

Jacques Tornay

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