«Je n'ai trouvé aucun texte qui oblige la femme à se couvrir la chevelure. Le combat que les musulmans ont mené pour le port du voile me désole, parce qu'il donne une image négative de la façon dont l'islam perçoit la femme», a déclaré Tareq Oubrou, imam de Bordeaux, dans une interview accordée à L’Express.
 
 
Religieux  érudit, cet imam français d’origine marocaine prône un islam moins  «tape-à-l’œil» et appelle à un ajustement des pratiques rituelles avec  les réalités de la société. «Cette tendance à tout ritualiser conduit  certains fidèles à parler plus de la pratique que de Dieu lui-même»,  regrette-t-il. Ce fils d'instituteur marocain, élevé aux confluents de  la tradition musulmane et de la modernité occidentale, n'hésite pas à  s'en prendre aux «ignares qui déterminent aujourd'hui ce qui est  orthodoxe».
 
Auteur  du livre Un imam en colère, Oubrou dénonce vivement «l’islam  d’apparence», affirmant que le plus important n’est ni le look ni la  tenue vestimentaire, mais plutôt la foi. «On est musulman lorsqu'on a la  foi ; c'est la grâce de Dieu qui sauve. Les pratiques cultuelles,  elles, sont aménageables», martèle-t-il, estimant que l’islam est «une  religion qui évolue avec la société». Il considère, à titre indicatif,  que les prières peuvent être effectuées après le travail et que le jeûne  du Ramadhan peut être reporté en cas de maladie.
 
Pour  lui, l’islam se trouve confronté à un vrai problème, celui des  comportements qui relèvent de l'éthique personnelle et qui sont devenus  des marqueurs pour beaucoup de musulmans : manger halal, porter le  voile, etc. «Avec le halal, nous ne sommes pas dans le sacré. Le fidèle a  seulement pour obligation d'alléger au maximum la souffrance de  l'animal», explique-t-il. Il assure en bon théologien que le hijab et  ses dérivés (niqab, foulard, burqa…) n’ont absolument rien de sacré.  Tareq Oubrou appelle les musulmans à ne pas confondre religion et  identité. Il demande aux musulmans de renoncer «à une certaine  visibilité» pour redorer leur blason.
 
«Il  faut que les musulmans puissent accorder leurs gestes à leur foi sans  perturber le fonctionnement de la société par des revendications  outrancières, quitte à renoncer à une certaine visibilité», estime cet  imam qui a mené une vaste réflexion théologico-canonique sur les  conditions de l'expression et de la pratique musulmane dans un espace  sécularisé.
 
Kay Cotrell, interview publiée dans l’Express.